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Brissot : Tableau frappant de la situation diplomatique

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Brissot : Tableau frappant de la situation diplomatique Empty Brissot : Tableau frappant de la situation diplomatique

Message  Vogesus Sam 10 Juil 2010 - 21:13

Discours prononcé par M. Brissot à l'Assemblée des Amis de la Constitution, le 10 juillet 1791 ou Tableau frappant de la situation actuelle des Puissances de l'Europe

... Les puissances étrangères vont fondre sur vous, nous dit-on.
Je le veux ; mais si, cédant à ce motif, vous oubliez vos principes, votre dignité, la constitution, pour ne plus voir qu’un danger extérieur ; en ce cas hâtez-vous de déchirer cette constitution : vous n’en êtes plus dignes, vous ne pouvez plus en défendre aucune partie. Croyez-vous en effet que si vos ennemis parviennent une seule fois à vous commander votre propre déshonneur, croyez-vous qu’ils s’arrêteront à ce premier pas ? Non. Ils vous forceraient à établir le projet des deux chambres, ce sénat héréditaire, partout le complice et l’appui du despotisme : ils vous forceront à ressusciter cette funeste noblesse, à côté de laquelle une constitution ne peut se maintenir : ils vous forceront à rendre au roi une partie de son autorité absolue ; enfin, à quoi ne vous forceront-ils pas ? Quel sera le terme de leurs demandes insolentes et de vos lâches faiblesses ? osez le fixer ; osez dire qu’arrivés à ce terme, vous aimerez mieux combattre et périr que de céder. Eh bien ! puisque vous ne pouvez éviter en cédant une seule fois, ou de retomber, de degré en degré, dans l’esclavage, ou d’être obligés de combattre, ayez donc le courage d’être grands, d’être fiers, d’être inébranlables, au premier pas, à la première demande audacieuse.
Les Romains avaient pour principe invariable de ne jamais négocier avec leurs ennemis, que ceux-ci n’eussent mis bas les armes... Et vous, vous craindriez des ennemis qui sont encore à les prendre contre vous ! vous fléchiriez par la frayeur de vains fantômes ! Mais que ceux qui redoutent ou feignent de redouter ces fantômes, osent les envisager ; qu’ils eussent de les toucher ; qu’ils voient ce qu’ils font, ce que vous êtes ; et les frayeurs disparaîtrons.
Qui êtes-vous ? Un peuple libre ; et on vous menace de quelques brigands couronnés et de meutes d’esclaves ! Athènes et Sparte ont-ils jamais craint les armées innombrables que les despotes de la Perse traînaient à leur suite ? A-t-on dit à Miltiade, à Cimon, à Aristide, recevez un roi ou vous périrez ? ils auraient répondu dans un langage digne des Grecs : nous nous verrons à Marathon, à Salamine... Et les Français aussi auront leur Marathon, leur Salamine, s’il est des puissances assez folles pour les attaquer.
Ici, messieurs, le nombre est même du côté de la liberté, et nous aurons à envier aux Spartiates la gloire qu’ils ont eue de lutter avec peu de héros ; contre des nuées d’ennemis. Nos Thermopyles seront toujours couvertes de légions nombreuses.
La France seule contient plus de citoyens armés, que l’Europe entière ne peut vomir contre elle de soldats mercenaires. Et quels citoyens ! Ils défendront leurs foyers, leurs femmes, leurs enfants, leur liberté ! Avec ces dieux tutélaires, on n’est pas vaincu, ou l’on sait s’ensevelir sous les ruines de sa patrie.
Quels soldats du despotisme peuvent faire longtemps face aux soldats de la liberté ? Les soldats des tyrans ont plus de discipline que de courage, plus de crainte que d’attachement ; ils veulent de l’argent, sont peu fidèles, désertent à la première occasion. Le soldat de la liberté ne craint ni fatigues, ni dangers, ni la faim, ni le défaut d’argent ; celui qu’il a, il le prodigue avec joie pour la défense de son pays (j’en atteste les braves soldats de Givet) ; il court, il vole au cri de la liberté, lorsque le despotisme lui ferait faire à peine quelques pas languissants. Qu’une armée patriote soit détruite, une autre renaît aussitôt de ses cendres. C’est que sous la liberté, tout est soldat, hommes, femmes, enfants, prêtres, magistrats. Deux défaites détruisent en Europe l’armée des tyrans la plus nombreuse et la mieux disciplinée. Les défaites instruisent et irritent les soldats de la liberté, et n’en diminuent pas le nombre.
O vous qui doutez des efforts prodigieux et surnaturels que l’amour de la liberté peut commander aux hommes ! Voyez ce qu’on fait les Américains pour conquérir leur indépendance ; voyez le médecin Warren qui n’avait jamais manié le fusil, défendre la petite colline de Bunkerhill, avec une poignée d’Américains mal armés, mal disciplinés, et, avant de se rendre, faire mordre la poussière à plus de douze cents militaires anglais. Suivez le général Washington, faisant tête avec 3 à 4 000 paysans à plus de 30 000 Anglais, et se jouant de leurs forces. Suivez-le à Trenton. Il me le disait : ses soldats n’avaient pas de souliers ; la glace qui déchirait leurs pieds était teinte de leur sang : Nous aurons demain des souliers, disaient-ils, nous battrons les Anglais... et ils les battirent.
Ah ! Que les hommes qui désespèrent de la valeur française, qui ne la croient pas capable de soutenir les efforts combinés des puissances ennemies, que ces hommes cessent de calomnier nos troupes de ligne qui, si redoutables lorsqu’elles combattaient pour des querelles étrangères, le feront bien plus lorsqu’elles se battront pour leur propre cause, leur liberté. Qu’ils cessent de calomnier nos gardes nationales, dont le dévouement s’est manifesté dans cette crise d’une manière si touchante, et qui accusent la fortune de ne leur avoir pas encore fourni l’occasion de développer leur valeur...
Athènes seul, le petit pays d’Athènes, sut pendant treize ans soutenir les efforts de la ligue des Spartiates, des Thébains, des Perses, et ne succomba qu’au nombre, qu’à la lassitude, qu’au défaut de moyens.
L’Angleterre a pu, lors de la révolution de 1640, soutenir pendant dix ans, pour recouvrer la liberté, la guerre intestine la plus désastreuse, et gagner des batailles au dehors.
Les Américains, peu nombreux, sans troupes disciplinées, sans munitions, sans artillerie, sans vaisseaux, sans argent, ont pu résister et vaincre, après sept ans de combats, une nation brave, riche, dont la marine ne connaissait point d’égale.
Et nous, ayant la vaste étendue de la France, dans nos montagnes et nos ports, plus de ressources que les Athéniens, nous plus heureux que les Anglais de 1640, redoutés jusqu’à présent de nos voisins, sans crainte de guerre intestine, maîtres des séditieux, unis par un concert qui ne fait de 25 millions d’hommes qu’une seule famille, une seule armée ; nous qui, plus heureux que les Américains, pouvons arrêter nos ennemis par des places bien fortifiées, par des armées disciplinées et nombreuses, par des gardes nationales familiarisées avec les fatigues ; nous, à qui le ciel a réservé, pour faciliter le passage du despotisme à la liberté, un fonds immense et riche, recouvré sur la superstition par le bon sens : nous craindrions, avec tant d’avantages réunis, des puissances que, sous le règne avilissant du despotisme, nous avons si souvent battues ! Quoi ! Sous ce despotisme, la France seule a pu résister à sept puissances combinées ; et l’amour de la liberté ne pourrait reproduire un miracle enfanté par un ridicule honneur !
Je le sais : si les étrangers se liguent, nous attaquent ils pourront vaincre d’abord. Mais Rome attaquée par Annibal, essuya quatre défaites, ne désespéra pas, et triompha ; mais les Américains ne sont arrivés à l’indépendance que par des défaites nombreuses... On prendra des villes, je le veux. Eh bien ! nos frères les habitants de ces villes trouverons des asiles partout. Nous partagerons avec eux et nos maisons et nos tables. Les enfants des martyrs de la liberté deviendront les nôtres. Nous essuierons les larmes de leurs veuves. Ah ! c’est cette douce communion des esprits et des cœurs, qui rend le soldat de la liberté invincible, qui lui fait recevoir la mort avec joie ; il lègue sa famille à ses frères, et non pas à des tyrans qui repoussent les enfants après avoir bu le sang du père.
Oui, messieurs, les hommes qui cherchent à nous décourager, à nous empêcher d’être justes, d’être libres ; par la crainte des puissances étrangères ; ne connaissent ni la force de la France ; ni les effets prodigieux de la liberté sur la caractère de l’homme, ni l’état des puissances étrangères, ni les changements que la révolution d’Amérique ; que celle de France ; que les développements prodigieux de la raison universelle ont fait et feront dans les cabinets politiques et dans les armées européennes.
Les monarques pouvaient autrefois se liguer les uns contre les autres, et chercher à se déchirer, pour partager les terres et les hommes du vaincu ; mais les hommes ne sont plus des meubles dont on puisse si facilement disposer malgré eux. Ces rois d’autrefois pouvaient perpétuer leurs guerres : il est aujourd’hui au dessus des forces de toutes les puissances de faire une longue guerre. L’argent en est le nerf, et ce nerf manque bientôt. Les nations libres peuvent seules et pour leur liberté soutenir de longues guerres. Le grand intérêt de la liberté, cet intérêt qui se nourrit de lui-même, remplace chez elle l’intérêt de l’argent qui s’épuise aisément. Ainsi, des puissances qui se liguent contre une nation libre, ont une chance prodigieuse contre elles ; elles ont la presque certitude d’ensevelir vainement leurs troupes et leurs trésors dans le pays de la liberté. La guerre de 30 ans, avec laquelle la Hollande acheta sa liberté, est une leçon éternelle pour les tyrans qui voudraient attaquer la nôtre. La puissance la plus formidable d’alors échoua dans ce pays ouvert, et que rien ne défendait, hors la valeur de ses habitants. Les trésors des deux mondes s’y engloutirent. Les tyrans connaissent ces exemples instructifs : ils ne les répéteront pas. Ils savent trop bien aujourd’hui que si leur cause est celle des tyrans, la nôtre est celle de toutes les nations, et que nous pouvons compter parmi leurs sujets et leurs soldats, presque autant de frères et de défenseurs.
Quel doit donc être maintenant leur calcul et leur but ? d’empêcher la propagation de cette déclarations des droits qui menace tous les trônes ; de conserver le plus longtemps possible le prestige qui les entoure ? Or, est-ce en s’armant contre nous, en inondant la France de leurs troupes ; que les rois étrangers préviendront la contagion de la liberté ? Peuvent-ils croire que leurs soldats n’entendront pas les saints cantiques, qu’ils ne seront pas ravis d’une constitution où les places sont ouvertes à tous ; où l’homme est l’égal de l’homme ? Ne doivent-ils pas craindre que leurs soldats, secouant leurs chaînes, n’imitent la conduite des Allemands en Amérique, ne s’enrôlent sous les drapeaux de la liberté, ne se mêlent dans nos familles, ne viennent cultiver nos champs, qui deviendront les leurs ?
Ce ne sont pas seulement ceux qui resterons avec nous qu’ils auront à redouter, mais ceux qui, lassés d’une guerre impie et infructueuse, retourneront chez eux. Ceux-là feront naturellement des comparaisons de leur sort avec le sort des Français, de la perpétuité de leur esclavage, avec l’égalité des autres. Ils trouveront leurs seigneurs plus insolents, leurs ministres plus oppresseurs, leurs impôts plus pesants, et ils se révolteront. La révolution américaine a enfanté la révolution française : celle-ci sera le foyer sacré d’où partira l’étincelle qui embrasera les nations dont les maîtres oseront l’approcher... Ah ! Si les rois de l’Europe entendent bien leurs intérêts, s’ils s’instruisent par les événements, ils chercheront plutôt à s’isoler de la France, qu’à se mettre en communication avec elle, en l’attaquant. Ils chercheront à faire oublier à leurs peuples la constitution française, en les traitant doucement ; en allégeant le poids des impôts, en leur donnant plus de liberté.
Nous sommes arrivés au temps où partout l’opinion publique, l’opinion des nations, est composée secrètement pour quelque chose dans la balance des tyrans. Ainsi, quand des hommes superficiels ont avancé que le gouvernement anglais pouvait commander des guerres à sa fantaisie, ils ont avancé une erreur. Sans doute la nation anglaise n’a plus de liberté politique ; mais elle sait encore faire respecter son opinion publique ; et l’avortement de la guerre contre la Russie en est la preuve. Si la flotte ne sort pas, c’est que la nation ne le veut pas ; elle est encore le véritable souverain, quoique George, en jouant la comédie de la revu, ait l’air de l’être seul.
Quand donc on veut prévoir ou la possibilité d’une guerre, ou les conséquences qui doivent en résulter, il faut consulter l’opinion publique chez ceux auxquels on y destine un rôle : l’opinion publique, dans tous les pays dont on voudrait employer les forces contre nous, est généralement en faveur de la constitution française, quoique certains articles puissent y déplaire. Nos papiers ont fait et feront à cet égard la conquête du monde entier, et la presse a enchaîné les bras des rois de l’Europe.
Voulez-vous vous convaincre davantage combien peu redoutables ils doivent vous paraître ? examinez la situation de leurs divers États.
Est-ce l’Angleterre que redoutent nos pusillanimes politiques ? Surchargée du poids énorme d’une dette qu’accroissent tous les jours et la vaine parade des armements contre la Russie, et la guerre désastreuse de l’Inde, elle a tout à craindre pour elle : impossibilité d’acquitter sa dette, perte de ses possessions dans les Indes orientales, scission avec l’Irlande, émigration constante de l’Ecosse. Étendez ses victoires, multipliez ses vaisseaux, sa dette n’en diminue pas ; donnez-lui dans l’Inde pour allié le versatile Nizam, le parjure Mahratte, l’empereur nominal, l’Empire anglais n’en est pas plus affermi ; il n’est que dans l’imagination. Or il est impossible que ce rêve de l’imagination dure encore longtemps, que 6 mille Anglais tiennent longtemps aux fers 20 millions d’hommes, et en effraient 100 autres millions.
Voilà, sans doute, ce que le ministre anglais voit : et il ne voudra pas précipiter sa perte, en déclarant une guerre que sa nation généreuse aurait en exécration. Il ne voudra pas la perte de cette nation, en commençant une guerre qui épuiserait les ressources dont il a besoin pour soutenir un empire qui ne tient plus qu’à un fil.
Est-ce la Hollande qu’on redoute ? Une femme impérieuse et détestée, un prince imbécile et méprisé, des États-Généraux esclaves, une aristocratie magistrale odieuse, deux factions aristocratiques prêtes à se déchirer, une canaille séditieuse aux ordres du prince ; point d’argent, point de crédit, point de vaisseaux, point de troupes, deux compagnies banqueroutières, et une banque ébranlée : voilà le gouvernement hollandais et ses moyens. Il a donc tout à craindre, et ne peut être craint.
Est-ce la Prusse ? Lorsque l’inquisition s’assied sur un trône, elle l’ébranle et l’affaiblit ; et le roi de Prusse n’est plus qu’un grand inquisiteur. Lorsqu’un prince est tour à tour voluptueux et illuminé, hardi et faible, l’arbitre de l’Europe et le jouet de ses ennemis ; ce prince a donné sa mesure ; elle n’est celle ni d’un conquérant, ni d’un prince habile ; elle est celle d’un homme vain et d’un égoïste : la liberté ne craint pas de pareils adversaires. Ajoutez ici : divisions dans le ministère, épuisement du trésor, disposition des soldats à la désertion, crainte de l’agrandissement de la maison d’Autriche, que notre ruine ou notre retour à l’état ancien favoriserait également ; et vous aurez de grands motifs de vous rassurer sur la Prusse.
Est-ce l’Autriche ? Un roi prudent met la paix dans ses États, avant d’entreprendre une guerre étrangère ; et Léopold est prudent, pacifique, et il est loin d’avoir la paix dans les parties éparses de son empire. Le Brabant frémit de ses chaînes ; les vrais vonckistes sont las d’être joués : les États ne sont point dupes des caresses perfides de la cour ; le peuple commence à voir clair ; tous n’attendent que le premier moment pour éclater. Léopold enverra-t-il en France des troupes, lorsqu’elles sont à peine suffisante pour contenir le Brabant, et ce malheureux pays de Liège qui rugit des atrocités de son sultan mitré ? S’attirera-t-il une guerre avec 25 millions d’hommes libres, lorsque tout à la fois il rompt avec le Turc, il veut contenir le Hongrois dont l’exemple de la Pologne stimule le caractère indomptable ; lorsque les États même d’Italie recèlent un foyer de sédition ; lorsqu’enfin les trésors à peine suffisants pour les dépenses ordinaires, seront bientôt épuisés par une guerre contre la liberté d’une grande nation ? Léopold cède partout, caresse tout, et jusqu’au fanatisme qu’il abhorre ; il sent sa faiblesse : et que craindre d’un prince faible et timide ?
Parlerai-je de cette ligue germanique, qui n’est qu’un vain fantôme, de ces petits États, qui osent receler chez eux nos fugitifs ? Si notre ministère avait eu quelqu’idée de la dignité de notre révolution, un mot de sa bouche eût fait rentrer dans le néant ces tyrans obscurs, dont le premier coup de canon mettra les peuples en liberté.
Parlerai-je des foudres de Rome ? Elles ne peuvent effrayer que des superstitieux ; et c’est le peuple lui-même qui a brisé l’idole de la superstition. Rome n’est plus à craindre quand le peuple est philosophe.
M’arrêterai-je aux fanfaronnades du don Quichotte du Nord ? Mais il n’est pas un Gustave, et nous ne sommes ni des Dalécarliens, ni des Russes. La Newa ne coule point en France.
Sera-t-on effrayé des mouvements de l’Espagne ? Mais les agitations de son roi, le changement de ses ministres, les réformes partielles que tente son ministère, la prohibition de nos ouvrages, la convocation des Cortez, la formation d’un cordon de troupes ; tous ces mouvements enfin ne prouvent-ils pas plutôt les terreurs que les projets hostiles du roi d’Espagne ? Frappé à mort, comme tous les autres souverains, il s’agite pour parer le coup ; et quand ses trésors ne seraient pas épuisés, quand il aurait du crédit, des armées et des provisions, la disposition des esprits est telle, et il le sait, que donner le signal de franchir les Pyrénées, c’est appeler la liberté dans son royaume.
Est-ce enfin le roi de Sardaigne, qui, avec quelques milliers d’hommes qu’il promène dans ses États, donne des convulsions à nos profonds politiques ? Mais des millions de Français peuvent-ils redouter un prince auquel une poignée d’écoliers a donné dernièrement la loi dans sa propre capitale ?
De ces tableaux, que résulte-t-il ? Que toutes les puissances étrangères ont à craindre les effets de la révolution française ; que la France n’a rien à craindre d’elles. Il en résulte que ces puissances se borneront à chercher à nous effrayer par des épouvantails, mais ne réaliserons jamais leurs menaces. Et dussent-elles les réaliser, il n’est pas d’un Français de les craindre ; il serait digne de nous de les prévenir. Ah ! ces craintes seraient depuis longtemps éteintes, si notre ministère avait été composé de patriotes, ou si l’assemblée nationale avait voulu prendre une attitude imposante vis-à-vis de toutes les puissances de l’Europe. Le Stathouder de Hollande eut l’audace de menacer le long parlement d’Angleterre, et ce parlement lui déclara aussitôt la guerre. Louis XIV et Mazarin donnèrent une retraite au fils de Charles Ier : le parlement fait signifier à l’orgueilleux monarque de chasser Charles de ses États ; et le souple Mazarin obéit. Observez que ce parlement, qui bravait ainsi les puissances étrangères, avait à soumettre dans son sein et l’Ecosse et l’Irlande rebelles ; qu’il n’avait que 40 à 50 mille soldats à ses ordres : et nous avons 3 millions de citoyens soldats. L’étranger le craignait ; il nous craindra, si la France veut enfin prendre le ton qui convient à des hommes justes et libres vis-à-vis des tyrans que notre silence seul enhardit : alors nos fugitifs disparaîtrons de leurs États, et l’on agitera plus les esprits avec de fausses craintes.
Vogesus
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Maire

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